Le 12 septembre 2024, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, élu en mars 2024, a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale et la tenue d’élections législatives anticipées le 17 novembre 2024.
La constitution sénégalaise prévoit, en son article 87, que des élections soient organisées dans un minimum de 60 jours et un maximum de 90 jours après la dissolution de l’Assemblée nationale, laquelle « ne peut intervenir durant les deux premières années de législature ». L’Assemblée nationale dissoute avait été constituée au terme des élections législatives du 31 juillet 2022. Elle avait été officiellement installée le 12 septembre 2022.
Depuis son accession au pouvoir, Bassirou Diomaye Faye, chef de l’Exécutif, devait cohabiter avec un pouvoir législatif dont la majorité, quoiqu’infime (83 sur 165), était constituée de députés favorables à son prédécesseur Macky Sall. Du reste, 80 des 165 sièges à l’Assemblée nationale étaient occupés par des députés alliés à Ousmane Sonko, l’actuel Premier ministre.
Les députés qui vont être élus au terme des élections législatives anticipées du 17 novembre 2024 vont constituer la 15e législature depuis 1968.
Dissoudre l’Assemblée nationale pour « ouvrir une nouvelle temporalité »
L’urgence pour le camp présidentiel d’organiser, dans de meilleurs délais, des élections législatives a été motivée par diverses raisons, dans la logique de s’emparer de la majorité à l’Assemblée nationale afin de faire appliquer sa politique avec plus de facilité.
En annonçant la dissolution de l’Assemblée nationale au cours d’une allocution télévisée, le 12 septembre 2024, Bassirou Diomaye Faye a notamment déclaré que « l’heure est venue d’ouvrir une nouvelle temporalité ». Faye a argué que la majorité parlementaire avait comme principal objectif de « ramer à contre-courant de la volonté du peuple sénégalais ». Pour justifier son point de vue, il a cité deux exemples : le débat d’orientation budgétaire annulé en juin 2024 après le boycott par les députés de la coalition de l’ex-président Macky Sall, et le rejet de la proposition de supprimer le Haut Conseil des Collectivités territoriales et le Conseil économique, social et environnemental par les députés de la nouvelle opposition.
Figures de proue
Au total, la Direction générale des élections (DGE) a officiellement retenu 41 listes de candidatures en vue de ces élections législatives.
Parmi les principales formations politiques qui prennent part à ce scrutin anticipé, figurent les Patriotes africains du Sénégal pour le Travail, l’Éthique et la Fraternité (PASTEF), le parti au pouvoir, dirigé par Ousmane Sonko, premier ministre du Sénégal, par ailleurs la tête de liste.
On note également la Coalition Diam ak Njerign dirigée par Amadou Ba, l’ancien premier ministre de Macky Sall (septembre 2022 à mars 2024), arrivé deuxième avec 35,79 % des voix lors de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 remportée par Bassirou Diomaye Faye. Depuis, Ba est souvent présenté comme un potentiel leader de l’opposition sénégalaise.
Il y a également la Coalition Samm Sa Kaadu dirigée par le maire de Dakar, Barthélémy Dias. Elle est composée des figures de l’opposition et de partis politiques parmi les plus importants du pays, à l’image du Parti de l’unité et du rassemblement (PUR); l’Alternative pour la Relève Citoyenne (ARC) d’Anta Babacar Ngom, candidate déchue lors de la présidentielle de mars 2024; Taxawu Sénégal de l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall; Les Serviteurs du député sortant et autre candidat malheureux lors de la dernière présidentielle Papa Djibril Fall; l’Alliance générationnelle pour les intérêts de la République (Agir); ou encore Gueum Sa Bopp dirigé par l’homme d’affaires Bougane Guèye Dany.
Autre coalition importante, Senegaal Kese, qui dit regrouper 14 mouvements et partis politiques reflétant une diversité d’acteurs politiques et de mouvements citoyens, dont l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail (ACT) de l’ancien premier ministre Abdoul Mbaye (2012–2013), la République des Valeurs/Réewum Ngor de l’opposant Thierno Alassane Sall, l’Alliance des Verts, les Mouvements Sàmm Sunu Kaddu et Un Autre Avenir, entre autres.
7,3 millions d’électeurs pour un scrutin mixte
Selon les données la DGE, ce sont précisément 7 371 890 électeurs, un peu plus de 40 % de la population du pays, qui sont appelés à élire les 165 députés de l’Assemblée nationale, à travers un système électoral mixte : un scrutin majoritaire pour 112 sièges et un scrutin proportionnel pour 53 sièges.
Les électeurs sont appelés à voter à travers 16 440 bureaux répartis sur 7 048 lieux de vote, dont 6 681 au Sénégal et 367 à l’étranger. Un seul bulletin de vote est utilisé pour participer aux deux types de scrutins.
Le scrutin majoritaire, « le tout au gagnant »
Dans ce scrutin, 112 sièges de députés sont à pourvoir. Parmi eux, 97 députés seront élus dans les 46 départements du Sénégal et 15 dans les 8 circonscriptions de la diaspora. Chaque département élit entre 1 et 7 députés selon sa population, tandis que chaque circonscription de la diaspora en élit entre 1 et 3.
Ce scrutin est simple dans son principe : dans chaque département ou circonscription de la diaspora, la liste arrivée en tête remporte tous les sièges en jeu, quel que soit le score des autres listes. Ainsi, une liste peut obtenir tous les sièges, même avec une faible avance, tant qu’elle est en première position.
Le nombre de sièges attribués par département ou zone de la diaspora est fixé avant chaque élection par un décret présidentiel qui prend en compte les données démographiques.
Le scrutin proportionnel, « listes nationales »
En parallèle au scrutin majoritaire, 53 autres sièges sont attribués selon un scrutin proportionnel sur une liste nationale, pour mieux représenter la diversité des voix exprimées. En effet, après le dépouillement et recensement définitif des voix dans les départements du pays et circonscriptions de la diaspora, la Commission nationale de recensement des votes (CNRV) divise le nombre total de suffrages valables (sans les bulletins nuls) par 53, soit le nombre de sièges à pourvoir au scrutin proportionnel pour déterminer le « quotient national ».
Ainsi, chaque liste obtient autant de sièges que de fois où le quotient national est contenu dans le nombre de suffrages qu’elle a recueillis. Par exemple, si une liste obtient un score qui représente deux fois le quotient national, elle gagne deux sièges.
Si des sièges restent après la première répartition des votes, ils sont redistribués aux listes ayant obtenu les suffrages les plus proches du quotient national. Il s’agit de la méthode du plus fort reste.
Les 165 députés à élire vont siéger à l’Assemblée nationale, en principe, pour un mandat de cinq ans.