C’est devenu une facilité de langage que d’utiliser le terme « fake news » pour parler de
désinformation. Pourtant, le journaliste du Monde spécialiste en fact-checking William
Audureau appelait dès 2017 à ne plus utiliser ce mot. Et la chercheuse Claire Wardle de First
draft insiste depuis plusieurs années sur les dangers de ce terme. La plupart des procédés
utilisés pour désinformer ne sont pas des « fausses nouvelles », argumente-t-elle. « La
plupart de ces contenus ne sont même pas faux ; ils sont souvent authentiques, utilisés hors
contexte et instrumentalisés par des personnes qui savent que les faussetés fondées sur un
noyau de vérité ont plus de chances d’être crues et partagées. Et la plupart de ces
informations ne peuvent être qualifiées de « nouvelles ». Il s’agit de bonnes vieilles rumeurs,
de mèmes, de vidéos manipulées, de « publicités sombres » hyperciblées et de vieilles photos
partagées comme s’il s’agissait de nouvelles. »
Elle poursuit en rappelant que « l’incapacité du terme « fake news » à rendre compte de
notre nouvelle réalité est l’une des raisons pour lesquelles il ne faut pas l’utiliser. L’autre
raison, plus puissante, est la façon dont il a été utilisé par les politiciens du monde entier
pour discréditer et attaquer le journalisme professionnel. »
Les différents ressorts de la désinformation ont été exposés par la chercheuse Camille
François de Graphika, sous l’acronyme de l’ABC de la désinformation. Le A désigne des
Acteurs manipulateurs, le B des comportements (Behaviors en anglais) trompeurs, et le C
des Contenus dangereux ou malveillants. Le terme fake news, qui se concentrent sur des
contenus faux, est excessivement restrictif. Il ne tient pas compte de toutes les manœuvres
utilisées par les acteurs malveillants, qui vont agir en dissimulant ou faussant leur identité,
ou les comportements faussés, tels que les amplifications non authentiques.
Marie-Paule Vopiadé, Centrafrique Check